Blue Monday : mythe ou réalité ?

Mis à jour en janvier 2024.

Les médias et les réseaux sociaux vont vous le rappeler à profusion : ce lundi 15 janvier est le jour le plus déprimant de l’année. Rien ne va plus, le temps est maussade, la pression au boulot augmente, le soleil a disparu on ne sait où et les projets tombent à l’eau : sortez vos mouchoirs ! Mais qui donc a décrété que le troisième lundi du mois de janvier serait le Blue Monday ?

A l’origine, il s’agit d’un coup de marketing. La chaîne télé d’un tour-opérateur a voulu lancer en 2005 une campagne de pub pour booster ses ventes et inciter les gens à voyager. Réserver un séjour au soleil pour sortir de sa déprime du mois de janvier, pourquoi pas au fond ? Inciter les gens à le faire en s’appuyant sur de faux fondements scientifiques, c’est plus délicat. La compagnie s’est en effet payée les services d’un universitaire (un psy… eh oui !) pour cautionner une formule un peu douteuse permettant de déterminer le jour le plus déprimant de l’année. Incroyable, mais vrai ! En 2010, le scientifique a avoué qu’il avait tout inventé… Mais le concept du Blue Monday est resté.

W=météo   D=dettes   d=salaire   T=temps depuis Noël
Q=temps depuis lequel vous ne remplissez pas vos résolutions de la nouvelle année
M=faible motivation   Na=besoin de changement 




C’est vrai que le mois de janvier offre peu d’ensoleillement et que la météo est rarement au beau fixe. Les fêtes sont passées et les prochaines vacances paraissent lointaines. S'ajoutent à cela la crise sanitaire (là, c’est le bouquet final !) ainsi que les perspectives économiques, écologiques ou climatiques qui peuvent créer un sentiment de déprime. Mais est-ce propre à notre époque ?

Les idées noires, le mal-être ou le pessimisme ont probablement toujours existé. Dans son Histoire du mal de vivre, l’historien Georges Minois observe que des scribes de l’Egypte antique exprimaient déjà il y a plus de trois mille ans des réflexions très pessimistes sur la condition humaine, la vieillesse ou la mort. Et c’est à Hippocrate, le célèbre médecin grec du Vème siècle avant notre ère, qu’on doit la première définition de la mélancolie. Aujourd’hui, on parle plutôt de dépression ou d’humeur dépressive, avec son cortège de symptômes (tristesse, fatigue, désintérêt, troubles du sommeil, perte d’appétit, pessimisme, …). Bref, avoir le moral dans les chaussettes n’est sans doute pas spécifique à notre époque, mais s'avère être plus probablement un état que chacun peut traverser à un moment de sa vie.

Alors, tout est fichu ? Impossible d’y échapper ? Peut-être pas… Les résultats d’une incroyable étude menée par trois chercheurs de l’université du Kentucky sur des récits autobiographiques écrits dans les années 1930 par 180 religieuses nous permettent de penser le contraire. La mère supérieure de deux couvents avait demandé aux futures nonnes de raconter par écrit leur enfance, de décrire leur scolarité et d’expliquer les raisons pour lesquelles les jeunes femmes souhaitaient rejoindre la congrégation. Aux débuts des années 2000, les scientifiques ont eu accès à ces archives et les ont décortiquées. Chaque phrase a été classée dans une catégorie « émotionnelle », soit positive, soit négative, soit neutre. Et chaque religieuse s’est vue attribuer un score émotionnel global, que les chercheurs se sont empressés de comparer aux temps de survie de chacune d’entre elles. Résultats des courses ? Les 25% considérées comme les plus heureuses sur base du contenu émotionnel des autobiographies ont vécu en moyenne dix années de plus que les 25% les moins heureuses ! Et ce, malgré le fait qu’elles aient partagé la même alimentation et le même mode de vie.

D’autres études scientifiques ont bel et bien confirmé qu’un état d’esprit positif et une vision optimiste de la vie influençaient favorablement la qualité et l’espérance de vie d’un individu. Nos émotions ont un impact sur notre santé, physique et mentale, et la longévité. C’est indéniable. On sait aussi que nous ne naissons pas tous égaux et que certaines personnes ont naturellement -disons même génétiquement- des prédispositions au bonheur.

Bien que certains semblent naturellement plus enclins à être heureux, le bien-être et le bonheur restent accessibles à tous. Cultiver les pensées positives et les émotions agréables ne relève pas seulement d’un don, encore moins de la magie. La teinte optimiste que l'on donne à notre vision du monde est comme un muscle, elle s’entraîne ! Des initiatives collectives fleurissent ici et là pour nous encourager à nous délester des pensées négatives et à cultiver une vision optimiste de la vie. En Flandre, depuis quelques années, une campagne « 30 jours sans se plaindre » débutant le « lundi bleu » tente de sensibiliser la population aux bienfaits des pensées agréables. Depuis 2018, la partie francophone du pays s’y est mise. La crise du coronavirus risque toutefois de mettre ces initiatives au second plan. Alors, faisons du « Do it yourself » et créons notre propre routine du bonheur.

Le journal télévisé ou notre site d’infos préféré parle d’un train bloqué pendant une heure en rase campagne, jamais des trains qui arrivent à l’heure. Une entreprise qui fait faillite ou licencie des dizaines de personnes fera la une ; celle qui vient de se créer et promet l’engagement d’autant de personnes ne recevra –au mieux- que quelques lignes en fin de rubrique économique. Et si on nous parle du Laos, du Paraguay ou de la Guinée équatoriale, c’est parce qu’une catastrophe naturelle s’y est déroulée. Ainsi fonctionne le cerveau humain. Il raffole des infos négatives, qui sont plus saillantes, mais aussi plus facilement mémorisables. Dans la vie de tous les jours, nous aurons ainsi tendance à ruminer sur la dernière remarque du boss ou à râler sur le bouchon qui nous a fait perdre 20 minutes au retour du boulot. Et la chouette discussion avec la nouvelle collègue ce midi ? Et la dernière chanson de notre groupe préféré que nous aurions ratée si nous étions rentrés à l’heure habituelle ?

Apprenons à repérer les moments agréables, cultivons les pensées positives. Choisissons de focaliser notre cerveau sur ce qui a généré en nous des émotions positives. En fin de journée, prenons quelques minutes pour identifier trois moments positifs de notre journée et nous les remémorer. Répétons l’opération jusqu’à ce qu’elle devienne une routine. Nous le faisons très facilement (trop, hélas !) pour le négatif. Entrainons-nous avec le positif. C’est bon pour la santé. Mentale et physique.

Dans l'article 5 "trucs" pour être (plus) heureux, je propose d’autres petites techniques simples permettant de développer une pensée positive et optimiste.

Si vous entendez parler de Blue Monday ce lundi matin-là, j'espère que vous sourirez en pensant au canular et repèrerez aussitôt une chose qui a pu éclairer positivement le début de votre journée. Bref, happy Blue Monday !



Cet article vous a plu ? Vous voulez voir d'autres articles ?